4 - LA SAVOIE - DOCUMENTS - HISTOIRE - Documents de Savoie - - 16 - Dimanche 16 avril Les compagnies de la garde nationale se sont réunies à six heures du matin. Elles étaient peu nombreuses. Après un peu d'exercice, la pluie étant venue on est entré dans la grenette pour procéder au tirage au sort des n° des compagnies et à la formation des comités pour le choix des candidats à proposer pour les places de Major et Colonel. La compagnie du faubourg Montmeillan était allé manuvrer séparément et s'est fait longtemps attendre. Elle a ensuite refusé sans motifs de tirer au sort, disant qu'elle voulait rester la première compagnie, comme étant formée de l'arrondissement n°1. On a été obligé d'envoyer chercher le syndic pour la mettre à la raison. Enfin il a cependant été tiré au sort, et cette compagnie par une curieuse coïncidence a tiré le n°1. On a formé les comités, j'ai été nommé et on a beaucoup parlé des personnes à proposer. On est forcé de tomber dans les nobles. Quand on se parle individuellement peu de personnes leur sont favorables. Dès qu'il y a réunion on se reporte presque toujours sur eux à moins qu'il y ait un accord antérieur. Je me suis promené dans l'après-midi avec Richard et Delaporte, ils m'ont raconté qu'à La Motte il y avait un village appelé Villarberon qui blâmait les autres paysans d'avoir secondé les messieurs pour repousser les envahisseurs du 3, en disant que ceux-ci n'en voulaient qu'aux riches, que les paysans auraient été beaucoup plus heureux etc Lundi 17 avril Les nouvelles de l'armée d'Italie sont peu rassurantes. Elle a été obligée de s'écarter de Peschiera qu'on disait avoir été pris. Tout cela fera un peu taire les fanfaronnades des journaux d'Italie. Les Italiens ne sont bons qu'à faire des chansons. Ils ne savent pas même faire de ces chants nerveux et entraînants comme La Marseillaise, le chant du départ et autres. J'ai vu Louis Guillaud qui m'a raconté qu'Aix était dans une agitation mauvaise par suite de l'influence funeste du médecin Veyrat qui après avoir mangé tout son bien se fait le prédicateur de l'égalité et du communisme. Il y a eu m'a-t-il dit de violentes querelles et peu s'en est fallu qu'il y eut une rixe entre les deux parties. Les candidatures pour la députation y sont également très ballottés. La candidature de Ginet présenté par François comme un gipseur vous présente une madone à acheter, éprouve de graves difficultés. Les Brachet, Berthier, Forestier et autres gros n'en veulent pas. La Chautagne le refuse. D'un autre côté ces messieurs se partagent entre Mr Despine et De Martinel. Mr Despine est soupçonné d'être sous l'influence de Brachet et est craint pour cela. Giraud est avec la Chautagne. S'il est ballotté avec Ginet il pourrait l'emporter. Aujourd'hui ont eu lieu les nominations des candidats pour le commandement du premier bataillon de la garde nationale. Ce sont Mr de Quincy, Blard, Pithon et Domenge. Elles prouvent un retour vers les idées antérieures au 3 courant. Je me suis trouvé au café avec De Martinel et Du Bourget tous deux recherchés pour la députation. Ils sont profondément aristocrates ; mais ils ne sont pas trop rétrogrades. Du Bourget nous a raconté que dans la nuit du 3 au 4 le comité provisoire dont il faisait partie avait été beaucoup égayé par les lazzi de Parent père, qui avait cependant fini par s'endormir au milieu d'un assez grand nombre de bouteilles de vin blanc. Il est des gens qui sont bien ridicules. A propos des candidatures pour le grade de commandant de la garde Falquet substitut de l'avocat des pauvres me proposait un Mr De Ferrière. Je me fis répéter plusieurs fois ce nom, et les qualités de l'individu en disant que personne ne le connaissait. Ce n'est que la quatrième fois que Falquet m'a dit enfin que c'était Mr Deville frère de " Merde de chien ". Berthier m'a raconté un trait honorable pour le fils Portier Dubellair. La soeur aînée de celui-ci est très aristocrate et exhalait devant eux ses pensées à cet égard. Son frère tacha d'abord de lui faire comprendre que ses prétentions étaient ridicules et poussé à bout il finit par lui dire : quand on est petite fille d'une cuisinière on ne doit pas se permettre de semblables prétentions. Mardi 18 avril Ce matin à sept heures j'ai rencontré François ayant à la main les épreuves de la profession de foi de son candidat Ginet. J'ai trouvé cette profession insignifiante et mal écrite. Il a paru dans le journal plusieurs autres professions de foi aussi insignifiantes. Cet après-midi a eu lieu la nomination des candidats pour le commandement du second bataillon de la garde nationale. Les mêmes noms nous sont sortis que pour le premier, mais avec une différence dans le nombre de voix. Sur 27 votants Blard n'a eu que 9 voix. Pithon a eu une grande majorité. Après la nomination je suis allé au café avec De Martinel qui m'a pris sous le bras pour me dire qu'il allait à Aix pour s'y présenter comme candidat à la députation. C'est un candidat aristocrate rétrograde vu les circonstances actuelles, et même pouvant approuver des mesures extrêmes. Cependant je le préfère aux autres. Il est honnête homme et indépendant de toute coterie de localité.
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